13.12.13

Revue de presse de la semaine

L'actualité de cette semaine reste largement marquée par la question de la signature de l'accord de sécurité bilatérale (BSA) entre les États-Unis et l'Afghanistan. À la surprise générale et malgré le vote positif de la Loya Jirga, Hamid Karzaï refuse toujours de signer le traité tant que ses demandes n'y sont pas incluses. De nombreuses interrogations planent encore sur les raisons de ce refus: manœuvre politique pour faire monter les enchères ou défense de l'intérêt national, les avis restent partagés. Dans un entretien accordé à Frédéric Bodin pour Le Monde, le président défend ses positions et accuse notamment les États-Unis de mener une guerre psychologique pour le pousser à signer. La non-signature du BSA signifierait un retrait total des troupes américaines sur le terrain et par la même occasion des troupes de l'OTAN. La perspective de cette « option zéro » est crainte car elle signifierait une déstabilisation profonde du pays et de la région. Le Général Dempsey, chef d’État major des armées des États-Unis, a déclaré que les militaires américains ne souhaitent pas une telle option et n'ont entamé aucune préparation dans ce sens. Au delà d'un retrait complet, le problème également évoqué est le retard pris par la signature de l'accord, qui met en cause la pérennité de l'action de certains pays en Afghanistan. En effet, de nombreux États ont déjà établi un agenda de retrait et, manquant de temps pour préparer la logistique nécessaire au maintien des troupes sur le sol afghan, pourraient mettre fin à leur engagement sans la signature rapide des accords bilatéraux et multilatéraux. À contre-courant, Robert Farley invite à ne pas trop s'alarmer sur la situation actuelle rappelant que le contexte n'est aujourd'hui plus celui des années 1990 et que les intérêts des États de la région en particulier étaient bien trop importants pour risquer un effondrement de l’État afghan.

La coopération régionale a justement été au cœur de l'agenda de la semaine. En début de semaine, l'Afghanistan et l'Iran ont annoncé un accord de principe sur la signature d'un traité de coopération et d'amitié. À Téhéran, la rencontre entre le président iranien Hassan Rouhani et Hamid Karzaï a été l'occasion pour le premier de rappeler la volonté de l'Iran de développer ses liens avec ses voisins et de participer au développement de l'Afghanistan mais aussi de rappeler son opposition à la présence de troupes étrangères dans la région ainsi qu'au Moyen-Orient et dans le Golf Persique. Cet accord de principe est peut-être le premier signe d'une plus grande coopération régionale, comme peut l'être par exemple le traité similaire signé avec l'Inde. Grâce aux accords bilatéraux, New Delhi participe par exemple à l’entraînement des militaires afghans aux techniques de la contre-insurrection. Cependant, il ne s'agit pour le moment que d'un accord de principe et les négociations débutent à peine pour la définition de son contenu. Malgré les accords de Genève, l'Iran est toujours soumis à d'importantes sanctions internationales, ce qui tend à limiter la coopération économique entre l'Afghanistan et son voisin. De plus, certaines questions sensibles, comme la présence et le traitement des réfugiés afghans sur le sol iranien, restent à résoudre.
L'Iran n'est pas seul État régional à améliorer ses relations avec l'Afghanistan. La visite de Nawaz Sharif à Kaboul le week-end précédent, a été aussi l'occasion de réaffirmer la volonté d'Islamabad de participer aux efforts afghans de paix. Certaines sources officielles demeurées confidentielles affirment d'ailleurs, selon l'Express Tribune, que les négociations secrètes, tenues au Pakistan entre le Haut Conseil de Paix afghan et les Taliban, représentés par Mullah Barabar, libéré par les autorités pakistanaises en septembre de cette année, montrent des signes positifs d'avancée. Depuis les élections pakistanaises en mai dernier, les relations entre l'Afghanistan et le Pakistan, souvent orageuses, semblent s'être légèrement améliorées, laissant penser à un début de dialogue régional.
Ces efforts en direction de la région se sont également traduits par le dialogue trilatéral qui s'est tenu à Kaboulen début de semaine entre la Chine, l'Afghanistan et le Pakistan. La rencontre entre l'ambassadeur Sultan Ahmad Bahin, le directeur général du 3ème département politique du ministère des Affaires étrangères d'Afghanistan, l'ambassadeur Luo Zhaohui, le directeur général du département des Affaires asiatiques du ministère des Affaires étrangères de la République populaire de Chine, et Muhammad Iftikhar Anjum, directeur général de la Division afghane au ministère des Affaires étrangères du Pakistan, a permis de réaffirmer la volonté des trois pays de développer la coopération régionale et le partage de l'information, qu'ils estiment essentiel pour le maintien de la paix et de la sécurité en Afghanistan et dans sa région. Ils ont également mis en avant le rôle important que peut jouer l'Organisation de Coopération de Shanghai dans l'établissement du dialogue et de la coopération entre les différents États régionaux.
Au-delà de la région, le ministre des Affaires Étrangères de l’Azerbaïdjan, a affirmé, lors d'une rencontre inter-ministérielle des forces de l'ISAF à Bruxelles le 4 décembre, l'engagement du pays vis-à-vis des forces de l'ISAF, auxquelles il s'est associé, et de Kaboul. Il a déclaré que les troupes azerbaïdjanaises de maintien de la paix resteraient présentes en Afghanistan après 2014 et que l’Azerbaïdjan souhaite continuer à développer sa coopération bilatérale avec le pays.

Enfin, l'actualité afghane internationale est également sportive. Dimanche, l'équipe de cricket afghane a fait face, pour la première fois dans le cadre de la compétition Twenty 20 International, à l'équipe pakistanaise qui a remporté la victoire lors d'un match serré. L'Afghanistan affronte maintenant l’Irlande pour la finale de la ICC Intercontinental Cup à Dubaï et se rendra le mois prochain au Zimbabwe pour le premier match de l'équipe en tant que membre à part entière du comité international. L'équipe s'est également qualifiée pour la « Coupe du Monde des 50 et plus » de 2015 en Australie et en Nouvelle-Zélande ce qui confirme ce succès et « l'histoire d'amour des Afghans avec le cricket ».

Mais le sport est aussi un moyen d'interroger et de faire évoluer les normes sociales, comme le montre l'équipe nationale féminine de cyclisme, sujet du documentaire de Sarah Menzies « Afghan Cycles », qui sortira dans les salles américaines au printemps 2014. Même si l'équipe ne dispose pas encore des moyens de participer à des compétitions internationales, elle ne cesse de se développer.